Soutenance de thèse de Arrouna KEITA

L’un des grands défis actuels est la gestion durable des ressources naturelles pour freiner le dérèglement climatique et assurer une transition énergétique juste. Cela nécessite une compréhension approfondie des économies des pays riches en ressources naturelles, notamment concernant leurs politiques budgétaires et les effets socio-économiques liés à la découverte, l’exploitation et la commercialisation de ces ressources. En effet, ces pays possèdent des ressources polluantes, comme le pétrole et le gaz, encore indispensables à l’économie mondiale, ainsi que des ressources critiques pour la transition énergétique, telles que certains métaux précieux. De plus, les ressources forestières, halieutiques et agricoles, sensibles à l’exploitation des précédentes, jouent un rôle crucial dans la sécurité alimentaire. La gestion de ces ressources repose donc sur une interaction complexe entre celles-ci. Cette thèse propose une approche intégrée sur la manière dont la découverte, l’exploitation, la typologie des ressources, l’ouverture commerciale et les politiques budgétaires interagissent et influencent des résultats socio-économiques tels que les inégalités de revenus et la sécurité alimentaire. La première partie analyse l'impact de l'ouverture commerciale sur les inégalités de revenus en distinguant les ressources issues de sources ponctuelles (pétrole, gaz, métaux précieux) des ressources diffuses (produits agricoles, forestiers). Une régression quantile sur un panel de pays à faible et moyen revenu montre que l'ouverture commerciale aggrave les inégalités dans l'ensemble de l'échantillon, tandis que la richesse issue des ressources diffuses les réduit, et que celles issues de sources ponctuelles n’ont pas d’effets significatifs. Les pays riches en ressources diffuses réussissent mieux en auto-emploi, favorisant des revenus plus autonomes. Dans ces pays, l'ouverture commerciale n'a pas d'effet significatif sur les inégalités, et la gouvernance joue un rôle mineur. À l'inverse, dans les pays moins riches en ressources diffuses, l'ouverture commerciale et les ressources ponctuelles augmentent les inégalités, faisant de la bonne gouvernance un facteur clé. La deuxième partie se concentre sur les effets sur la discipline budgétaire des découvertes des ressources provenant des sources ponctuelles. En s’appuyant sur le modèle des projections locales et un échantillon de pays à différents niveaux de revenus, les résultats montrent que l’annonce de découvertes de gigantesques gisements de pétrole ou de gaz crée des attentes de revenus futurs, influençant les politiques budgétaires avant même le début de l’exploitation. L’analyse montre que, tandis que les pays à revenu moyen supérieur et revenu élevé réussissent à maintenir une discipline budgétaire, les pays à revenu faible et revenu moyen inférieur tendent à adopter des politiques budgétaires procycliques. Toutefois, cette tendance est modérée par la qualité des institutions et la présence de règles budgétaires. La troisième partie s’intéresse aux ressources diffuses et à leur lien avec la sécurité alimentaire, en analysant la proportion de cultures de rente dans la production agricole totale (PCR) et son impact sur l’efficience des dépenses publiques agricoles (EDPA) en Afrique subsaharienne. Les scores d’efficience sont calculés avec la méthode DEA-Bootstrap, utilisant les dépenses publiques agricoles par habitant en input et des indicateurs de sécurité alimentaire en output. Alors que dans 79 % des pays étudiés, la PCR est inférieure à 15 %, une régression Beta révèle qu’une proportion plus élevée de cultures de rente améliore l’EDPA et la sécurité alimentaire. Les revenus tirés de la vente de ces cultures permettent de stabiliser la production agricole, diversifier la consommation et de se protéger contre les aléas saisonniers, en compensant le manque d’infrastructures pour la transformation et le stockage des cultures vivrières.