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L’Orléanais, terre de juristes. Ici, c’est le droit #5 Jousse

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Daniel Jousse, le grand criminaliste français des Lumières (1704-1781)

Né le 10 février 1704 à Orléans, mort à Orléans le 21 août 1781, Daniel Jousse est profondément lié à sa cité d’origine.

Un enfant de la bourgeoisie orléanaise du négoce du sucre et du vin

Fils du négociant en sucre François Jousse et de Marie-Madeleine Polluche, d’une famille spécialisée dans le commerce des vins, Daniel Jousse étudie les humanités au collège des Jésuites de la ville avant d’étudier le droit à la Sorbonne, mais aussi d’autres disciplines : mathématiques, physique, astronomie et belles-lettres. S’il garde des liens avec Paris après ses études, en particulier avec l’Académie des sciences du fait de son goût pour l’astronomie et les mathématiques, et fréquente ses salons par l’intermédiaire de son éditeur Debure, il revient s’installer à Orléans où sa famille lui a acheté une charge de conseiller au présidial. Il s’y marie le 30 mai 1740 à Catherine-Monique Jacques et leur fils Daniel-Charles lui succède au présidial d’Orléans mais son décès précoce obscurcit la vieillesse du grand criminaliste.

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Daniel Jousse

Un professeur de droit ancré dans le territoire de l’Orléanais

Ami de Pothier, collègue de Prévost de la Jannès, Jousse décline la proposition de devenir lieutenant criminel du Châtelet. Il demeure toute sa carrière au présidial d’Orléans tout en étant professeur de droit français à la faculté de droit d’Orléans et très impliqué dans les affaires locales. Il travaille par exemple avec l’intendant de la généralité d’Orléans sur la dangerosité des grands chemins. En tant que magistrat, il sanctionne les adeptes de la bulle Unigenitus du pape Clément XI qui fulmine contre les écrits jansénistes, et parmi eux Marie-Félicité Le Trosne, la sœur de son collègue juriste physiocrate orléanais. Jousse est délégué par ses collègues de plusieurs présidiaux pour plaider leur cause auprès de la Chancellerie en 1764. En plus de ses fonctions universitaires et judiciaires, ce grand notable provincial est marguillier de la paroisse Saint-Paul et propriétaire agricole à Épieds-en-Beauce. Il s’intéresse d’ailleurs à l’histoire et aux coutumes de la province de l’Orléanais, publie avec Pothier des notices érudites sur « le jeu de fief »

Un jurisconsulte curieux de toutes les branches du droit

À l’instar de Pothier, Jousse s’intéresse à toutes les branches du droit, même s’il est avant tout connu et reconnu pour son Traité de la justice criminelle en France de 1771 qui pose les fondements du futur Code pénal impérial de 1810, en s’inspirant des avancées philosophiques.

Soucieux de la sécurité publique et de la stabilité de l’État, Daniel Jousse embrasse en deux mille pages l’ensemble du droit criminel, avec clarté de la langue et rigueur du raisonnement. S’appuyant sur la doctrine, avant tout sur les auteurs italiens dont Farinacius, il prône une douceur des peines mais s’écarte de Beccaria. Il présente le procès-type et les voies de recours et offre une réflexion sur les usages politiques du procès criminel. Attaché au respect des formalités et de l’équilibre du procès, il insiste sur les devoirs de la fonction du juge, sur le rôle éminent de l’avocat et condamne le recours à la « question » préalable, relevant qu’elle n’est pas en usage en Angleterre, alors qu’on y « vit avec autant de sûreté qu’ailleurs ».

 Pierre Allorant

Pour aller plus loin :

Pierre Allorant, « Daniel Jousse », in Pierre Allorant, 250 Lieux, personnages moments. Patrimoine en Beauce, Berry, Gâtinais, Perche, Sologne, Touraine, PUFR, 2018, p. 349.

Antoine Astaing, « Daniel Jousse », in Patrick Arabeyre, Jean-Louis Halpérin et Jacques Krynen (dir.), Dictionnaire historique des juristes français XIIe-XXe siècle, PUF, « Quadrige », 2015, p. 564-566.

Corinne Leveleux-Teixeira (dir.), Daniel Jousse. Un juriste au temps des Lumières, Pulim, 2007.